Écriture inclusive : que dit la loi ?

Lois sur l'écriture inclusive

Illustration : Marie Troadec

L’écriture inclusive, instrument d’égalité, suscite de nombreuses controverses, y compris au sein du Parlement. Présentée par ses détracteurs et détractrices comme réductrice et illisible, elle est pourtant un levier pertinent pour lutter contre les inégalités et mettre au travail les représentations véhiculées par notre langue.

Si elle fait couler beaucoup d’encre, aucune loi qui l’interdit n’a pour le moment été adoptée. Alors, que dit concrètement la loi sur l’écriture inclusive aujourd’hui ?


Le 26 janvier 2022, une énième proposition de loi visant à interdire l’écriture inclusive voit le jour au Parlement. Proposé par Pascale Gruny, sénatrice Les Républicains, le texte n° 404 souhaite rendre caducs les documents officiels rédigés en français en écriture inclusive. Magnanime, la sénatrice accorde aux entreprises un délai de 6 mois pour rendre les chartes, règles, ou autres documents administratifs conformes à cette exigence.

L’écriture inclusive : une inflation législative

Si cette proposition a franchi la phase du dépôt et est maintenant examinée en première lecture au Sénat, c’est bien l’une des seules. Pourtant, nombre de parlementaires se sont déjà échiné·es à limiter son usage. En janvier 2022 uniquement, 2 propositions de loi visant à « lutter contre » ou encore « interdire » l’écriture inclusive ont vu le jour. 

Elle serait « illisible, imprononçable et impossible à enseigner » pour ne citer que l’exposé des motifs de la proposition de loi portée par la sénatrice Gruny. 

De l’écriture inclusive s’est glissée dans cette dernière phrase, saurez-vous la retrouver ? Bravo, il s’agit bien du terme « sénatrice », car oui, l’écriture inclusive, c’est aussi des noms épicènes, des formulations englobantes ou la féminisation des noms de métiers. Il ne s’agit pas uniquement du point médian (mais si, celui-ci : « ⋅ »)

Cette proposition de loi est révélatrice de la méconnaissance de la sénatrice sur l’écriture inclusive : il ne s’agit pas d’une grammaire, mais bien de l’ensemble des attentions graphiques et syntaxiques qui permettent d’assurer une égalité de représentation.

L’exécutif, historiquement ouvert sur l’écriture inclusive

En 2017, la circulaire Philippe avait établi les règles de féminisation et de rédaction des textes publiés au JORF. Elle renvoyait à un document qui datait lui de 1999 : « Femme, j’écris ton nom… ». Lionel Jospin, alors Premier ministre, déclarait en préface : « Notre pays aime les querelles qui tournent autour de sa langue […] Cela prouve, s’il en était besoin, l’attachement de nos concitoyens à leur langue et le souci permanent du “bon usage” qui nous anime. » 

Au vu des critiques adressées envers l’écriture inclusive, nous ne pouvons que lui donner raison. Ces démarches témoignent d’une certaine volonté des Gouvernements de renforcer l’égalité entre les femmes et les hommes. 

Les administrations s’ouvrent progressivement au langage inclusif. Des organismes sont créés pour répondre à cette exigence. Dernier en date : Le HCE (Haut Conseil à l’Égalité) créé en 2013. Sa mission est de surveiller et de corriger les inégalités dans les textes de loi et, depuis 2017 établir un rapport annuel sur l’état du sexisme en France. 

Un pas de géant depuis la création du poste de secrétaire d’État à la Condition féminine, occupé par Françoise Giroud en 1974.

En 2022, le HCE publie une mise à jour de son guide pour une communication publique sans stéréotypes de genre, dont Raphaël Haddad, Fondateur et Directeur associé de Mots-Clés a d’ailleurs assuré la co-expertise. Et, contrairement à ce que laissent entendre les propositions de loi, c’est avant tout pour vous simplifier la vie. 

L’écriture inclusive n’est pas une obligation. Pour autant, cette pratique constitue un premier pas pour éviter les pratiques discriminantes qui sont, elles, pénalement répréhensibles. Dans le cadre de l’accès à l’emploi par exemple, la loi reconnait plusieurs critères discriminatoires, dont le sexe. Le risque ? 3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende.

La seule et unique loi qui cadre l’écriture inclusive est donc la loi 94-665 relative à l’emploi de la langue française. Car oui, les sempiternelles controverses n’y changeront rien : c’est bien de cela qu’il s’agit. 


L’écriture inclusive, si elle inquiète par sa ponctuation encore peu démocratisée, est bien moins rigide qu’il n’y parait. Il ne s’agit pas de révolutionner la langue, mais plutôt d’inviter à l’inclusivité par le langage. Tout comme le dictionnaire, elle est le reflet de la société.

Une loi l’interdisant serait donc absurde. Ce serait nier la nature vivante du langage voire les efforts de visibilisation historiquement fournis par l’exécutif.

Vous souhaitez vous former ou former votre équipe aux fondamentaux de l’écriture inclusive ?