Qu’est-ce que l’UX Writing ?

Définition et conseils pour l’UX Writing

L’UX Writing, qu’est-ce que c’est ? D’où provient cette notion ? En quoi consiste-t-elle concrètement ? Quels en sont les bénéfices et les limites ? Comment Mots-Clés mobilise-t-elle l’UX Writing dans sa pratique éditoriale au service d’institutions ou de grandes entreprises ?

Faites le tour de cette notion dans cet article fondateur de notre blog, rédigé par Raphaël Haddad, linguiste, fondateur et Directeur associé de l’agence Mots-Clés.

Vous trouverez dans cet article : 

  • Une définition de l’UX Writing ;

  • un bref rappel de l’histoire de cette pratique et quelques références bibliographiques utiles pour UX Writers ; 

  • des exemples d’écriture UX ; 

  • enfin, la présentation de « l’excellence rédactionnelle ». Une méthode en 3 phases, développée par l’agence Mots-Clés, pour structurer la démarche d’UX Writing.

Et si vous avez plutôt envie de voir concrètement un exemple réussi d’UX Writing, vous pouvez consulter notre étude du parcours client de Back Maket (c’est gratuit !) :

Temps de lecture : 8 minutes

UX Writing : une définition

UX Writing signifie « User Experience Writing » ou en français littéral « Écriture centrée sur l’expérience des utilisateurs et utilisatrices ». 

L’UX Writing mobilise les principes du design UX aux travaux d’écriture pour les entreprises ou les institutions. L’essor de cette notion est relativement récent. Google Trends montre que le nombre d’internautes qui recherchent « UX Writing » croît de manière importante dans le monde depuis juillet 2018 :

Google trends : UX Writing

L’UX Writing est d’abord pensée comme une écriture pour le Web. Même si elle s’applique désormais à tous les contenus qu’une entreprise ou une institution peut produire à destination de ses différents publics : clientes et clients, prospects, visiteurs et visiteuses de son site Web, talents.

Initialement, l’écriture UX poursuit 3 objectifs 

  1. un enjeu marketing : proposer des contenus éditoriaux intéressants ou utiles pour les lecteurs et lectrices ; 

  2. un attendu stylistique : écrire de manière tonique et dans des modalités claires, voire faciles à lire et à comprendre  (référentiel FALC) ; 

  3. un critère technique : répondre aux impératifs sémantiques du référencement naturel (SEO On page). 

Ces 3 éléments sont restés le noyau de toute démarche d’UX Writing, même si progressivement le champ recouvert par cette notion s’est élargi.

Pour Torrey Podmajersky, l’autrice d’un ouvrage de référence paru en 2019 intitulé Strategic Writing for UX et elle-même UX Writer pour Google ou Xbox, l’UX Writing consiste simplement à « choisir les mots de l’expérience utilisateur ». C’est-à-dire les titres et sous-titres, les descriptions, les boutons de call to action, les champs du formulaire et même (et surtout !) les messages d’erreur. Idem pour Guy Ligertwood. Ce turbulent Product Designer a publié un article sur Medium en 2017 sur principales évolutions sémantiques de la réécriture UX d’un formulaire en ligne.

Ainsi, c’est l’entrée lexicale qui semble prévaloir dans les approches fondatrices de l’UX Writing.

On voit là poindre une première limite. En effet, d’autres dimensions langagières participent pleinement de l’expérience utilisateur et utilisatrice. Citons notamment : le ton de marque, l’imaginaire mobilisé, la structure narrative sous-jacente, les arguments choisis ou encore la posture énonciative. Or, ces éléments vont aussi déterminer la qualité éditoriale et participer au parcours de l’utilisateur ou utilisatrice. Ils doivent donc être pris en compte dans une démarche que l’on pourrait qualifier de full stack UX Writing, par transposition de la notion de full stack development.

Une brève histoire de l’UX Writing, de Georges Perec à Google

L’écriture UX avant l’UX

Avant de devenir la Présidente fondatrice d’une florissante maison de vente aux enchères, une bonne amie voulait il y a quelques années créer les éditions des chiens de fusil.

Elle souhaitait rééditer des classiques de la littérature dans des formats où les textes se trouveraient reproduits à l’identique en pages paires et impaires. Cela permettrait la lecture simultanée d’un couple allongé en chien de fusil. L’anecdote est romantique à souhait, mais elle rappelle surtout que les métiers de l’édition se posent depuis longtemps la question de l’expérience de lecture… bien avant l’émergence de l’écriture UX.

Autre exemple dans la presse. C’est la prise en compte de l’évolution des usages de lecture et de prises en main qui fait progressivement disparaitre le grand format broadsheet au profit du plus compact tabloïd

On retrouve également cette préoccupation chez de grands auteurs. Si ces questions vous passionnent autant que moi, prenez à l’occasion quelques minutes pour lire l’inspirant essai de Georges Perec intitulé Lire : esquisse socio-physiologique (accès gratuit ici, mais il est aussi paru dans un recueil posthume appelé Penser/classer). Il constate que « lire est un acte » et que donc l’expérience détermine la lecture. Je ne résiste pas au plaisir de le citer dans son style inimitable, pour un court instant (et pour vous donner envie de le lire !) :

« Comment est-ce perçu un roman qui s’étale entre Montgallet et Jacques Bonsergent ? Comment s’opère ce hachage du texte, cette prise en charge interrompue par le corps, par les autres, par le temps, par les grondements de la vie collective ? », nous écrit-il.

Fin de la digression.

L’UX Writer : une fonction d’abord instituée par Google

L’UX Writing en tant que notion instituée nait d’abord chez Google. L’entreprise crée à partir de 2015, la fonction d’UX Writer. L’objectif est de concevoir simultanément les contenus éditoriaux et l’interface de ses services. Le tout dans un objectif : garantir la meilleure expérience utilisateur ou utilisatrice.

L’inspiration design est cruciale : la fonction d’UX Writer appartient à l’univers des métiers de la branche Google Design. Deux notions semblent capitales pour Google et apparaissent dans la job desc. de l’UX Writer :

  1. celle de « qualité éditoriale »

  2. celle de « parcours de l’utilisateur ou utilisatrice »

Dans le sillage de Google, nombre d’entreprises se dotent d’UX Writers ou font écrire ou réécrire leurs contenus éditoriaux pour les rendre cohérents avec l’expérience utilisateur visée.

Au sein de Mots-Clés, nous avons déjà mené des missions de rédaction UX pour nombre d’institutions et de grandes entreprises. Citons notamment le Conseil régional d’Île-de-France. Nous avons en 2019 repris plusieurs centaines d’articles d’actualités publiés sur le Web de l’institution. Ou encore MAIF, pour qui nous avons décliné en marqueurs éditoriaux leurs principes d’expérience. Puis, nous les avons appliqués sur des contenus à destination de leurs sociétaires (désolé de ne pouvoir en dire davantage !).

L’écriture UX, ce n’est pas seulement pour les grandes organisations !

L’UX Writing n’est pas l’apanage de grandes organisations : nous rédigeons régulièrement des contenus pour des PME ou des startups (sites Web, landing pages, newsletters, livres blancs, tribunes). Il est crucial d’adopter dans ce contexte une démarche centrée sur les besoins des utilisateurs et utilisatrices.

Nous avons chez Mots-Clés structuré notre approche de l’UX Writing. C’est ce que nous appelons « l’excellence rédactionnelle ». Elle reprend les 3 objectifs fondamentaux de la démarche (marketing, stylistique et fonctionnel, tels que définis précédemment). Mais au-delà, elle s’appuie sur l’état de nos travaux en Analyse du discours (via le Lab’ R&D) et notre expérience des méthodes agiles transposées à la production de contenus.

« Excellence rédactionnelle » : nous avons choisi une formulation en français, car notre langue ne manque pas de ressources pour dire avec justesse, sans avoir à passer par l’anglais.

ux writing

L’excellence rédactionnelle, une méthode d’écriture UX

Pour nous, l’excellence rédactionnelle caractérise la méthode qui permet de garantir une écriture centrée sur l’expérience des utilisateurs et utilisatrices

L’excellence rédactionnelle revient aux fondamentaux des démarches UX design.

Elle accorde une large place à la recherche primaire et secondaire UX et à la gestion des avis des parties prenantes tout au long d’un processus d’idéation. Puis elle applique ces deux principes cardinaux à un travail d’écriture pour une marque ou une institution. 

Concrètement, une mission d’excellence rédactionnelle se structure toujours en 3 temps :

  1. Une phase d’exploration et d’idéation :

La difficulté d’une démarche d’écriture UX tient souvent à l’accumulation, voire à l’antagonisme des contraintes.

Par exemple « il faut écrire court » pour répondre aux injonctions de la direction marketing, mais quand même « assez long » pour plaire aux crawlers Google et espérer atteindre la première page Google ou SERP#1.

Ou encore, il faut reprendre « notre vocabulaire spécifique » réclamera la direction métier, mais « se soucier de l’accessibilité » rétorquera la direction RSE. Variante rencontrée lors d’une précédente mission : proposer un « parcours cohérent de contenus », mais « permettre le snacking ».

Alors, comment se sortir de ce qui tourne immanquablement à l’injonction contradictoire ?

Quelques astuces déjà éprouvées avec succès pour se sortir de l’impasse :

  • Réaliser un benchmark. Cela va mettre en évidence les meilleures pratiques déjà observables ailleurs et rendre visuelle et probante la démarche dès l’origine.

  • Interviewer les parties prenantes internes ou externes. Cela assure de la bonne compréhension des enjeux et donne à chacune d’elle, à raison, le sentiment que son point de vue est entendu et mieux pris en compte.

  • Faire appel à la R&D ! Matérialisée chez Mots-Clés par un format dénommé « l’œil du lab’ », la recherche peut aussi être précieuse. Elle apporte un cadre conceptuel et décompose un problème complexe en sous-problèmes simples. 

Tous ces éléments conjugués vont nous permettre de définir les spécifications éditoriales des contenus à produire et de bien les adapter aux enjeux définis. Ce premier travail d’écoute va nous permettre de lister les attentes de chaque partie prenante et de les hiérarchiser. Par exemple, l’exigence SEO-friendly sera moins pesante pour une landing page que pour la page « offre » d’un site internet. 

Cette première étape d’exploration et d’idéation va aussi entretenir le consensus interne indispensable pour réussir. En effet, les contenus UX sont des contenus sensibles ou à forts enjeux. En conséquence, ils dépendent souvent de la validation de plusieurs parties prenantes. Pour cette raison, il est nécessaire d’imaginer des réponses innovantes ou malicieuses pour se dépêtrer intelligemment des points de friction identifiés entre les différentes contraintes éditoriales.

C’est ainsi que nous pouvons renouveler des genres très codifiés de l’écriture d’entreprise à destination de client·es ou talents. Citons le SMS promotionnel, l’accusé de réception, le formulaire d’inscription ou même, la fiche de paie.

2. Une phase de prototypage et tests :

Le travail de prototypage va consister en la définition de marqueurs éditoriaux concrets qui découlent des principes d’expérience visés. Ces marqueurs portent sur les 5 dimensions du discours : narration, argumentation, énonciation, sémantique et enfin pragmatique.

Par exemple, prenons le principe design de « sobriété » et déclinons-le sur les 5 dimensions de discours en marqueurs éditoriaux :

  • Sur le plan narratif, il se décline éditorialement par une structure évidente.

  • Sur le plan argumentatif, par un exposé logique plutôt que métaphorique.

  • À l’échelle sémantique, par l’abolition de signes forts de ponctuation comme le point d’exclamation et d’interrogation.

  • Sur l’aspect énonciatif, par des phrases simples [sujet] + [verbe] + [complément]. Ou encore par une préférence pour des tournures actives plutôt que passives.

  • Sur le plan pragmatique (l’effet « réel » d’un discours sur ses destinataires), par une définition de l’effet recherché : qu’est-ce qu’un discours sobre doit avoir comme effet sur les lecteurs et lectrices ? C’est justement le test utilisateur qui va nous aider ici.

Si vous voulez avoir une idée plus précise de la manière dont on décline en marqueurs éditoriaux des principes design, vous pouvez jeter un œil à cet article qui traite des mots de la considération. L’article a été rédigé par Mots-Clés pour l’AFRC, association leader de l’expérience client à laquelle l’agence est adhérente. 

C’est toujours dans son contexte qu’un texte prend son sens.

Par exemple, écrire « Merci pour votre commande et bon opéra ! » n’aura évidemment pas le même sens selon que vous vous trouvez dans l’interface de la FNAC, ou du pâtissier Christophe Michalak.

Reprenant la théorie de la transtextualité de Gérard Genette, nous avons chez Mots-Clés décomposé l’approche rédactionnelle sur les 3 dimensions qui lui donnent sens : le texte, le paratexte et l’épitexte. En conséquence, le travail de prototypage se réalise nécessairement avec le studio de Mots-Clés ou une équipe de designers internes au client, afin de brasser ces 3 dimensions et penser leurs interactions. À ce stade, il faut réinscrire le travail d’UX Writing dans la globalité de l’interface, si l’on veut garder une vision pertinente des contenus proposés. 

Nous optons en général pour 2, voire 3 prototypes afin d’obtenir une approche contrastive lors des tests. Les tests sont en effet l’autre composante essentielle et indissociable de cette phase. Rien ne nous semble plus étrange que de produire des contenus prétendument UX sans utilisateurs ni utilisatrices dans la démarche. Or, c’est malheureusement ce qui s’observe dans un nombre croissant d’institutions, où l’expression UX Writing est reléguée au rang de gage de modernité éditoriale.

En fait, c’est dans la confrontation entre les contenus et le regard de l’utilisateur ou l’utilisatrice, ou mieux sa prise en main (le fameux « acte de lecture » défendu par George Perec que j’évoquais plus haut), que se garantit véritablement l’écriture UX.

Pour cette raison, les prototypes des contenus rédigés sont nécessairement testés auprès d’un échantillon représentatif du public auquel ils sont destinés. Et parfois même testés plusieurs fois, jusqu’à obtenir les réponses nécessaires. Et mettre en place des tests n’est pas forcément coûteux : l’A/B testing ou les focus groups permettent de collecter des retours d’usages tout à fait instructifs et qui font bondir la qualité UX d’un contenu produit.

3. Une phase de finalisation et de mise en production :

Vient alors la dernière phase de finalisation d’un prototype et de mise en production.

Les prototypes vont être évalués au regard des retours utilisateurs et utilisatrices collectés lors des tests. Puis, ils vont être figés lors d’une session de restitution aux parties prenantes durant laquelle le cheminement parcouru depuis la phase d’exploration sera retracé.

C’est aussi à ce moment que le travail « méta » prend sa place : les marqueurs éditoriaux sont définitivement stabilisés et classés en fonction des principes design auxquels ils réfèrent. De la même manière, quelques exemples de prototypes designés sont annotés, pour pouvoir servir de référentiels et illustrer concrètement le travail UX Writing mené.

Conjugués à une session de formation, ce sont ces référentiels annotés qui vont permettre aux équipes de rédacteurs et rédactrices UX au sein de l’agence ou de la content factory en résidence chez le client, d’écrire de manière cohérente avec l’intention UX initiale.

Pour Mots-Clés, l’excellence rédactionnelle caractérise une méthode.

Davantage qu’une recette toute faite et réplicable à l’identique quelque soit l’institution, elle est une approche qui assume sa dimension foncièrement exploratoire et embrasse simultanément toutes les dimensions par lesquelles un écrit participe d’une expérience réussie. C’est bien la moindre des choses pour les organisations qui nous confient finalement leur capital symbolique le plus précieux : le design de leur discours. 

Envie d’en savoir plus sur l’application concrète de l’UX Writing ?

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