L’Académie française face à l’écriture inclusive

L'écriture inclusive face à l'Académie française

Le 30 octobre dernier, le Sénat a adopté en première lecture un texte visant à interdire l’écriture inclusive. Dans la foulée, Emmanuel Macron a ensuite affirmé, à l’occasion de l'inauguration de la Cité Internationale de la langue française, que “le masculin faisait le neutre”.

Ce n’est pas la première fois, loin de là, que le langage inclusif est attaqué par ceux que l’on considère comme garants de la pureté de la langue française. Parmi eux, l’Académie française, qui a qualifié en 2017 l’écriture inclusive de « péril mortel » pour celle-ci.

Qu’est-ce qui déclenche les crispations de ses membres ? Pourquoi les « Immortels » (Immortel·les ?) sont-ils (et elles ?) si farouchement opposé·es à son application ? On vous explique tout dans cet article.

Temps de lecture : 2,5 minutes 

L’écriture inclusive, une « aberration » 

L’Académie française s’estime « garante de l’avenir » de la langue. Son rôle principal est donc défini comme celui de « donner des règles certaines à notre langue ». Dans ce souci, elle publie en 2017 une déclaration dénonçant l’écriture inclusive et s’interrogeant sur ses objectifs. 

En 2021, l’Académie considère toujours l’écriture inclusive comme contreproductive pour la lutte contre les inégalités de sexes. Rappelons que cette institution était entièrement masculine jusqu’en 1980. Elle l’est encore aujourd’hui, à une très large majorité.

De plus, selon les académicien·nes, l’écriture inclusive s’opposerait au principe de la démocratie de la langue. Elle la rendrait plus complexe pour les personnes dyslexiques. Elle poserait en outre une entrave à l’apprentissage du français et alourdirait la tâche des pédagogues. 

Cette « nigauderie » émanant du camp des progressistes, des jeunes et des féministes nuirait également, selon elle, au développement de la francophonie. Elle pousserait les francophones à substituer l’anglais au français. 

Toutefois, il est bel et bien clair que le contraire est prouvé : l’écriture inclusive fait progresser l’égalité femmes-hommes. Et elle en est même un levier très puissant, tant au niveau individuel qu’institutionnel. 

A l’échelle individuelle, l’écriture inclusive agit sur les représentations mentales. Pascal Gygax et al. présentent dans cet article un panorama des études faites sur la question. Une de ses conclusions rapporte que les formulations fléchies (les étudiantes et les étudiants), épicènes (les élèves) ou englobantes (la population étudiante) provoquent environ trois fois plus de représentations mentales féminines que les formulations au masculin (les étudiants). 

À une échelle institutionnelle, Raphaël Haddad, dans son livre : « L’écriture inclusive, et si on s’y mettait ? », souligne que l’écriture inclusive est un instrument puissant pour la féminisation des candidatures. Elle contribue aussi au rajeunissement des entreprises. Cette écriture favorise enfin l’ancrage des politiques d’égalité dans les entreprises.

Le point médian ? Les pronoms neutres ? Non, non et non !

Retour en 2014 : un incident tumultueux a lieu le 10 octobre à l’Assemblée nationale. Le député Julien Aubert refuse de nommer la présidente de séance Sandrine Mazetier « Madame la Présidente ». À l’issue de cela, l’Académie publie le jour même une déclaration visant à faire une « mise au point » sur la féminisation des noms de métiers, des fonctions, des grades et des titres. 

Un peu moins réticente face à la tendance de féminisation, mais toujours s’y opposant, elle dénonce « un esprit de système qui tend à imposer, parfois contre le vœu des intéressées, des formes telles que professeure, recteure, sapeuse-pompière, autrice, ingénieure, procureure, etc., pour ne rien dire de chercheure, qui sont contraire aux règles ordinaires de dérivation et constituent de véritables barbarismes ». 

Ce n’est qu’en 2019 que l’Académie finit par manifester une forme d’acceptation des usages en cours. Elle souligne à ce propos que les « nouvelles générations donnent souvent la préférence aux appellations qui font droit à la différence ».

Malgré ce lâcher-prise, l’Académie reste toutefois opposée aux innovations lexicales, telles que les pronoms neutres, ainsi qu’au point médian. Finira-t-elle par céder aux emplois en vigueur ? Le scénario créé avec la féminisation des noms de métiers se reproduira-t-il ? 

Si vous cherchez toujours des réponses aux arguments de l’Académie, ne cherchez pas loin. Cet article vous propose un panorama clair et concis de contre arguments basés sur des études et des faits vérifiés.