Discrimination à l’embauche : supprimons les biais sexistes

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Comment les outils informatisés d’aide au recrutement participent des discriminations à l’emploi

C’est nouveau sur le blog de Mots-Clés : nous accueillons des contributions externes sur des sujets qui nous préoccupent, en lien avec nos métiers, le langage et la communication. Pour entamer cette série de publications, que rêver de mieux que d’un regard sur la visibilité des noms de fonction au féminin sur les réseaux sociaux professionnels ?

Merci Marion Beurard d’ouvrir le bal avec cet article qui illustre brillamment l’influence du langage sur nos représentations.

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Ancienne ingénieure en microélectronique et diplômée du master d’études de genre de Paris 8, je suis en projet de création d’activité en tant que formatrice sur les thématiques du genre à destination des entreprises de haute technologie de Grenoble. 
— Marion Beurard

Illustrations : Anne Beurard

Temps de lecture : 15 minutes 

Cet article traite de la visibilité des noms de fonction au féminin sur les réseaux sociaux professionnels et les offres d’emplois. Si le sujet émerge bien de mon expérience d’usagère des services proposés par LinkedIn, ce papier ne correspond nullement à une mise à l’index de cette entreprise en particulier. En revanche, les observations détaillées ci-après mènent à une réflexion plus large et me conduisent à interpeller les acteurs et les actrices du monde professionnel. 

Il s’agit ici de démystifier certaines idées reçues sur la communication non sexiste, d’apporter une meilleure compréhension de la culture qui favorise les inégalités de genre sur le marché du travail et d’appeler les personnes à faire face aux freins de la transition vers l’égalité réelle.

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Discriminations sexistes et emploi : quand l’algorithme fait la loi

Les moteurs de recherche : le point aveugle de la parité professionnelle ?

Avant d’entrer dans le vif du sujet, permettez-moi de me présenter. Du baccalauréat à très récemment, c’est-à-dire pendant un peu moins d’une quinzaine d’années, je faisais partie de la minorité féminine des filières technologiques, en tant qu’étudiante puis ingénieure en microélectronique. J’ai ensuite choisi le monde de la recherche sur le genre en nouveau domaine de prédilection. Aujourd’hui, je fais le relai entre ces deux univers.

Le but de cette section est d’argumenter en faveur d’une analyse des algorithmes d’aide au recrutement (notamment l’outil « Trouvez des talents » de LinkedIn) au prisme de potentiels biais fondés sur le genre.

Si un tel biais était confirmé, sa correction permettrait d’associer indifféremment des personnes utilisant des noms de fonctions au féminin ou au masculin, quel que soit le genre du profil entré dans la barre de recherche de l’outil. 

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Exemple : une personne chargée de la procédure de recrutement consulte le réseau social en quête d’un ingénieur ou d’une ingénieure spécialiste. Elle publie une annonce. Il y a de fortes chances pour que l’offre d’emploi titre « Ingénieur spécialiste de… H/F ».

De plus, lors de sa recherche de profils, elle tapera certainement dans la barre de recherche d’un ou plusieurs services en ligne « Ingénieur spécialiste de… ». Soit deux formes masculines, alors que le comportement souhaité de l’outil serait qu’il remonte indifféremment des profils d’ingénieures et d’ingénieurs dans les résultats de la recherche.

Un outil qui favorise le référencement des profils masculins 

Cette contrainte est confirmée par un expert de l’assistance clientèle du site :

« En effet, il est tout à fait vrai que pour augmenter vos chances d’être repérée par des recruteurs, vous devriez nécessairement utiliser un nom de fonction au masculin. Cela augmente votre visibilité, car les recruteurs ont tendance à effectuer leur recherche tout en tenant en compte ce facteur. [sic] »

Après avoir consulté l’assistance clientèle, j’ai sollicité une directrice de rédaction française du réseau social que j’avais identifiée comme sensible à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. 

Surprise de la réponse du SAV, cette dernière m’explique que ce n’est pas le comportement attendu :

« Pour ce qui est de formateur/formatrice, les résultats de recherche proposent bien les formateurs et les formatrices, que vous saisissiez “formateur” ou “formatrice”. Constatez-vous un résultat différent ? [sic] »

L’aide au repérage de profils de LinkedIn « Trouvez des talents » est un service payant, destiné aux sociétés. Je n’aurais donc pas pu procéder à cette vérification par mes propres moyens. D’autre part, déclarer sur la base de on-dit, que l’algorithme sur lequel ce service fonctionne comporte un biais sexiste serait abusif. 

En revanche, un diagnostic par des personnes compétentes, extérieures à l’entreprise, serait plus que souhaitable. Que LinkedIn souffre d’une mauvaise réputation est une chose, mais une communication aussi contre-productive que celle de son SAV m’alerte.

L’utilisation usuelle du masculin : une tendance qui s’auto-entretient 

L’expert LinkedIn précise en sus que l’utilisation usuelle du masculin par les candidates et les candidats entraîne une forte tendance des recruteurs et recruteuses à uniquement masculiniser les mots-clés de leurs recherches.

Dans la pratique, c’est ce qu’il se passe. Beaucoup de gens ne s’identifiant pas en tant qu’hommes utilisent le masculin pour désigner leur fonction, et l’on ne peut pas leur jeter la pierre. C’est d’ailleurs ce qu’une formatrice de l’Association pour l’Emploi des Cadres applique pour elle-même et conseille très fortement aux chercheuses d’emploi. Puisqu’elle est en poste actuellement elle utilise la forme féminine, soit « Consultante RH ». Alors que si elle était en veille active, elle intitulerait certainement son poste « Consultant RH ».

Si le biais sexiste de l’algorithme en question est un mythe, le mythe existe bel et bien. Et il a malheureusement un effet concret. Le fait que les utilisatrices de formes féminines voient sensiblement se réduire leurs chances de référencement reste à confirmer. Mais celles-ci sont tout bonnement incitées à masculiniser leurs profils. 

Ceci constitue une discrimination fondée sur le genre. Il conviendrait donc de briser ce cercle vicieux en faisant en sorte que les candidates puissent librement utiliser le féminin sans dégrader leurs chances de trouver un emploi.

Les annonces d’emploi, entre bonnes volontés et résistances

Dans un monde professionnel résolument engagé vers l’égalité réelle entre femmes et hommes, les annonces des postes proposés seraient systématiquement rédigées à l’aide de formes génériques épicènes (par exemple « Ingénieur ou Ingénieure spécialiste de ceci »). Au passage, on évacuerait le motif H/F devenu redondant.

Le monde professionnel n’est pas idéal, mais il se pourrait bien qu’il soit en transition vers l’égalité réelle. Pour preuve, la cause de la parité est institutionnalisée en France depuis les années 1990*. Plus récemment, certaines entreprises, dont LinkedIn, en ont fait un sujet prioritaire. La directrice de rédaction du réseau social citée ci-dessus m’a ainsi assurée, en réponse à mon retour d’expérience, que l’entreprise était très engagée et vigilante sur le sujet.

Je reçois encore presque exclusivement des annonces de postes liées à mes précédentes activités. L’emploi du masculin générique est toujours majoritaire dans les titres de ces annonces. Cependant, depuis un ou deux ans, les doubles flexions commencent à faire leur apparition. La double flexion, c’est le fait de préciser explicitement que le poste s’adresse à un ingénieur ou une ingénieure. 

On parle alors d’emploi du générique épicène (par exemple, « les candidates et les candidats »), par opposition à l’emploi du générique masculin (par exemple, « les candidats »). La double flexion peut s’écrire en toutes lettres (« Ingénieur ou Ingénieure ») ou à l’aide d’une abréviation typographique (le point médian ou point milieu). Par exemple, sur un échantillon de 60 offres, les graphies les plus souvent observées sont « Ingénieur·e » et « Ingénieur(e) ». D’autres existent, et toutes sont regroupées à des fins de lisibilité sous la graphie
« Ingénieure » pour créer le nuage de mots ci-dessous.

Sur les 60 premières annonces relayées par mon profil LinkedIn le 09 avril 2021 : 34 postes d’ingénierie dont 28 titrent au générique masculin et 6 au générique épicène.

Sur les 60 premières annonces relayées par mon profil LinkedIn le 09 avril 2021 : 34 postes d’ingénierie dont 28 titrent au générique masculin et 6 au générique épicène.

Ces évolutions sont encourageantes, mais ne nous réjouissons pas trop vite. Certains de ces titres gardent la forme au générique masculin en oubliant désormais l’information H/F qui prend habituellement place en bout de titre ! 

Une avancée serait que les relais en ligne des opportunités professionnelles (tels que LinkedIn) exigent des entreprises recruteuses une rédaction à base de génériques épicènes. 

Ainsi, équipes de développement et/ou de communication des moteurs de recherche, sections recrutement des entreprises et potentiels collaborateurs et collaboratrices ont à leur portée un moyen de nous faire avancer collectivement vers l’égalité rêvée.

« Écriture inclusive » : énième mise au point à l’attention des apôtres du générique masculin

Si à ce stade de l’article vous avez l’impression que je m’apprête à rejouer les débats animés de 2017 sur le langage inclusif, vous avez en partie raison. Ce sujet — la visibilité des noms de fonction au féminin sur les réseaux sociaux professionnels et les offres d’emplois — et celui du langage inclusif ont bien un point commun. Il se trouve dans la conviction que le langage a été historiquement instrumentalisé pour entériner les inégalités entre les sexes en général, et plus spécifiquement l’exclusion des femmes des sphères professionnelles valorisées.

Un nouveau débat, vraiment ? 

La discussion mérite pourtant d’être prolongée, étant donné que six années après la parution de la première version du guide pratique « Pour une communication publique sans stéréotypes de sexe » du Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes (HCE), les recommandations ne sont toujours pas appliquées. 

De surcroit, une proposition de loi visant l’interdiction de « l’usage de l’écriture inclusive pour les personnes morales en charge d’une mission de service public », a même été déposée le 23 février 2021 par le député La République en marche François Jolivet et signée par soixante élues et élus de l’Assemblée nationale.

Le Bescherelle grammaire édition 2012 prescrit : « Lorsque l’adjectif se rapporte à plusieurs noms de genres différents, il se met au masculin pluriel ». Cette règle est bien connue sous une formulation aujourd’hui révoquée, qui a eu l’inconvénient de marquer les esprits : le masculin l’emporte sur le féminin. Cette aberrante formule est l’un des aboutissements d’un processus de masculinisation de la langue française commencé au XVIe siècle.

En raison de la soi-disant supériorité du genre masculin, dit plus noble que le genre féminin, cette règle grammaticale a été retenue en dépit des protestations et au détriment de règles plus intuitives, telles que la règle d’accord de proximité ou d’accord selon le sens. Éliane Viennot, professeuse émérite de littérature française, est l’autrice des deux essais sur lesquels s’appuie ce paragraphe (Non, le masculin ne l’emporte pas sur le féminin ! petite histoire des résistances de la langue française et Le langage inclusif : pourquoi, comment).

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L’exemple suivant, extrait du second ouvrage, illustre le propos de façon amusante :

Le dogme inventé au XVIIe siècle nous oblige en effet à énoncer : « Deux cents petites filles, leurs sept institutrices et un chat sont morts dans l’incendie. » Ce qui fait dire à certaines petites filles (la chose m’a été rapportée par une institutrice) : « Même un chat, ça l’emporte sur moi ? » Vrai que c’est fort de café.

Demandons donc aux hommes d’imaginer qu’on leur enseigne « Deux cents petits garçons, leurs sept instituteurs et les trois souris qu’ils avaient dans une cage sont mortes dans l’incendie. » Parce que « c’est comme ça » parce que « en français, le féminin l’emporte sur le masculin ». Ne penseraient-ils pas que la grammaire a bon dos ?

Un autre désastre conséquent à la masculinisation de la langue française est justement l’usage unique des noms de professions au masculin. Non seulement pour désigner un groupe composé de femmes et d’hommes, mais aussi bien pour désigner une femme d’une certaine profession. Quoique ce soit de moins en moins le cas, il arrive encore que le mot auteur soit utilisé pour désigner une femme. Ne serait-ce que pour respecter la logique, les termes autrice et écrivaine ont été déterrés après une omission volontaire séculaire. Ces mots sont aujourd’hui largement employés.

Alors oui, le générique masculin est encore utilisé comme s’il était neutre. Cette conceptualisation elle-même est le fruit du processus susmentionné d’invisibilisation du féminin. La règle n’est donc pas immuable.

Côté scientifique, les preuves sont là !

Aux arguments historiques et politiques pour refuser l’emploi du générique masculin en tant que neutre, il faut ajouter l’argument avancé par des chercheurs en psychologie sociale dans un article de 2008, intitulé « Un ministre peut-il tomber enceinte ? L’impact du générique masculin sur les représentations mentales ». Ce travail expérimental a consisté en une série de cinq études visant à mesurer l’impact de l’emploi du générique masculin sur les représentations mentales par rapport à l’emploi d’un générique épicène. Les résultats des expériences sont donnés ci-après.

En moyenne, 23 % des représentations mentales sont féminines après l’utilisation d’un générique masculin, alors que ce même pourcentage est de 43 % après l’utilisation d’un générique épicène. La différence varie presque du simple au double […] et ceci indépendamment du fait qu’il s’agit de candidats politiques, d’artistes, de professionnels, de personnages de roman ou de personnes fictives. Le générique masculin affecte les femmes et les hommes, les adultes et les enfants.

Ces constats concordent avec les recherches effectuées antérieurement dans d’autres langues. Sont citées les études menées en langues anglaise, allemande et espagnole. Les recherches en langue anglaise montrent non seulement que l’emploi du générique masculin active davantage de représentations masculines, et confirment aussi le désavantage professionnel pour les femmes. 

Les scientifiques français se réfèrent notamment à une étude américaine établissant la diminution du nombre de candidates lorsque les postes sont décrits à l’aide de génériques masculins. L’étude équivalente n’existe toujours pas en français.

On ne peut donc pas dissocier le genre grammatical du genre social (que l’on peut définir comme construction sociale de production d’inégalité entre les femmes et les hommes). Mais ce qu’on appelle désormais « les inégalités entre les sexes » voire « les inégalités de genre » n’est pas une fatalité. 

Les femmes et les hommes tendent à être de moins en moins cantonnés aux rôles sociaux associés à leur sexe d’assignation. Les cartes de la distribution des professions peuvent encore être rebattues, et nos modes de communication professionnels peuvent et doivent soutenir cette évolution.

« Féminisation » des noms de métiers : une ambivalence révélatrice ?

En 1999, la maison d’édition du gouvernement (La Documentation française) publie « Femme j’écris ton nom…, guide à la féminisation des noms de métiers, titres, grades et fonctions ». Le rapport est préfacé par le Premier ministre Lionel Jospin et rédigé par l’Institut national de la langue française. L. Jospin y encourage la « féminisation » des noms de métiers, titres, grades et fonctions pour désigner la personne qui la remplit. En revanche, ni lui ni l’équipe rédactrice du corps de texte ne remet en question l’emploi universel du générique masculin.

Quelle implication pour les noms de fonction dans les titres des offres d’emploi ? 

Je suis moi-même ex-ingénieure en microélectronique et les offres indiquent pour la grande majorité « Ingénieur spécialiste de ceci H/F ». La préface de L. Jospin ne remet pas en question l’emploi du générique masculin dans ce cas. 

Il en va de même pour le reste du rapport, rédigé par des scientifiques linguistes. Même si elles et ils contestent la neutralité du masculin pour un nom (forcément soit féminin soit masculin), la règle de « neutralisation des genres » pour les accords relatifs à l’emploi conjoint de noms des deux genres serait de mise. Le masculin prendrait alors une forme « non marquée ». La circulaire du 21 novembre 2017 du Premier ministre Édouard Philippe se situe dans la droite ligne de son prédécesseur. Les anciennes préconisations sont confirmées :

Le masculin est une forme neutre qu’il convient d’utiliser pour les termes susceptibles de s’appliquer aussi bien aux femmes qu’aux hommes. […] L’intitulé des fonctions tenues par une femme doit être systématiquement féminisé — sauf lorsque cet intitulé est épicène — suivant les règles énoncées par le guide d’aide à la féminisation des noms de métier, titres, grades et fonctions élaboré par le Centre national de la recherche scientifique et l’Institut national de la langue française, intitulé « Femme, j’écris ton nom… ».

En encourageant les formes au générique épicène dans certains cas, E. Philippe fait un pas en avant :

Je vous demande de systématiquement recourir, dans les actes de recrutement et les avis de vacances publiés au Journal officiel, à des formules telles que « le candidat ou la candidate » afin de ne pas marquer de préférence de genre.

Puis deux pas en arrière : 

En revanche, je vous invite, en particulier pour les textes destinés à être publiés au Journal officiel de la République française, à ne pas faire usage de l’écriture dite inclusive, qui désigne les pratiques rédactionnelles et typographiques visant à substituer à l’emploi du masculin, lorsqu’il est utilisé dans un sens générique, une graphie faisant ressortir l’existence d’une forme féminine. Outre le respect du formalisme propre aux actes de nature juridique, les administrations relevant de l’État doivent se conformer aux règles grammaticales et syntaxiques, notamment pour des raisons d’intelligibilité et de clarté de la norme.

La position paradoxale de l’ancien Premier ministre E. Philippe est analysée par la chercheuse E. Viennot dans un article du site d’actualité français du groupe Le Monde le HuffPost. Le message pro « féminisation », mais contre ce que l’homme politique nomme « l’écriture inclusive » conduit à un non-sens révélateur.

D’abord, ce positionnement ignore le fruit des années de recherche produite à analyser les inégalités de genre. De plus, il ne cherche pas non plus à donner l’exemple en mettant en application les recommandations antisexistes du HCE.

Si l’on peut plaider la position de compromis d’un Premier ministre faisant « avancer la cause de la féminisation [sic] » à la veille des années 2000, celle du premier chef du gouvernement d’Emmanuel Macron n’est pas excusable. 

Aujourd’hui, quand on est pour l’égalité, on ne peut chercher à entériner l’emploi du générique masculin. 

L’ambivalence de cette position n’est pas pour encourager la transition de société réclamée par tant de personnes. Un engagement véritable de la part des personnes jouissant de pouvoir politique, ou de pouvoir de décision dans une firme, ou enfin des instances influentes, telles qu’un réseau social professionnel largement utilisé, est indispensable.

P.S : À l’occasion des échanges qui ont alimenté la rédaction de cet article, « ingénieuresse » m’a été suggérée pour désigner mon ancienne fonction. Et dire que je n’y avais pas pensé avant ! 

E. Viennot soutient que le suffixe — esse est le plus prestigieux qui ait jamais été forgé en français (duchesse, déesse, abbesse, comtesse, maîtresse, etc.). C’est d’ailleurs pour cela qu’il a été le premier à être condamné. Ah si j’avais pu m’identifier à une chevaleresse** des temps modernes, peut-être n’aurais-je pas quitté la profession…

Marion Beurard

 

* L’Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes est créé en 1995, puis remplacé par le Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes (HCE) en 2013.

** Chevaleresse : métier féminin de la fin du XIIIe siècle (VIENNOT, Éliane, Raphaël HADDAD, et Chloé SEBAGH. Le langage inclusif. Op. cit. page 39) ; le rapport « Femme, j’écris ton nom… » donne chevalière comme forme féminine contemporaine.

Sources : 

Pour une communication publique sans stéréotype de sexe, première version. HCE, 2015.

JOLIVET, François. Proposition de loi no 3922 portant interdiction de l’usage de l’écriture inclusive pour les personnes morales en charge d’une mission de service public

BESCHERELLE, Louis Nicolas. Bescherelle. 2 : La grammaire : pour tous. Paris : Hatier, 2012. 319 p, page 205.

VIENNOT, Éliane. Non, le masculin ne l’emporte pas sur le féminin ! petite histoire des résistances de la langue française. Donnemarie-Dontilly : Éditions iXe, 2014. 118 p.

VIENNOT, Éliane, Raphaël HADDAD, et Chloé SEBAGH. Le langage inclusif : pourquoi, comment. Donnemarie-Dontilly : Éditions iXe, 2018. 142 p.

BRAUER, Markus. « Un ministre peut-il tomber enceinte ? L’impact du générique masculin sur les représentations mentales », L’Année psychologique. 2008. p. 243 — 272.

La Documentation française. Femme, j’écris ton nom… Guide d’aide à la féminisation des noms de métiers, titres, grades et fonctions, Paris, 1999, 124 p.

PHILIPPE, Édouard. Circulaire du 21 novembre 2017 relative aux règles de féminisation et de rédaction des textes publiés au Journal officiel de la République française. 

VIENNOT, Éliane. « La circulaire Édouard Philippe ne met pas le point final à l’écriture inclusive ».